Pour l’amour de l’effort

Communes et sport: Villaz-St-Pierre Jean-Claude Pache, ultra-traileur de 55 ans. Photo Lib / Charly Rappo, Lussy, 08.09.2020

La commune de Villaz aime courir et Jean-Claude Pache peut-être plus encore que ses concitoyens Patrick Biolley Communes et sport Cinq ­villages réunis sous le même nom et la même passion: la course à pied. Bien sûr, il n’y a pas que l’effort solitaire qui permet aux cinq villages de Villaz de bouger. Le football ou le tir font ­également partie des possibilités sportives pour les près de 2300 habitants. Mais avec les chemins de forêt et les sentiers mal plats à portée de foulée, la course à pied remporte la palme. Parmi les mordus de la discipline dans le coin: Jean-Claude Pache. Le quinquagénaire, sous ses airs timides, n’est pas le coureur du dimanche que l’on croise en bordure de champs. Coupe fribourgeoise et gruérienne, Morat-Fribourg, ­évidemment, mais aussi Sierre-­Zinal, l’ultra-trail du Mont-Blanc, les 100 km de Bienne ou encore la Diagonale des fous, le menuisier de formation en a sous la semelle. Surtout si l’on ajoute à cela son autre passion pour le ski-alpinisme qui l’a emmené à la Patrouille des glaciers, la Pierra Menta ou la Mezzalama. «Je suis un bon populaire», assure-t-il. Il faut lui rappeler qu’une troisième place au Mont-Blanc et ses multiples victoires ne sont pas des résultats communs pour qu’il admette: «OK. Peut-être un très bon populaire.» Il éclate de rire.

En famille

L’histoire sportive du Glânois est plutôt commune. D’abord footballeur au sein du club local, Jean-Claude Pache est petit à petit passé à l’athlétisme. «Je courais beaucoup, mais avec le ballon ce n’était pas ça», sourit-il. C’est donc assez naturellement qu’il a troqué les crampons pour les baskets et s’est élancé pour son premier Morat-Fribourg à 17 ans. «Je n’en ai pas raté un depuis… Sauf cette année évidemment. Mais je pense que j’irai quand même le faire, seul.» Sa relation d’amour avec l’épreuve l’a conduit à flirter avec l’heure sur la course commémorative, un tour d’horloge et 43 secondes pour être précis. C’était en 1991. «Pour passer sous l’heure cela aurait représenté un ou deux entraînements supplémentaires chaque semaine durant quatre ou cinq mois, souligne-t-il. Le chrono est une motivation, c’est sûr. Il me pousse à m’entraîner afin de gagner du temps sur moi-même. Enfin, maintenant, le but serait plutôt d’en perdre le moins possible.» Oui, Jean-Claude Pache a l’art de la petite phrase incisive et ne manque pas d’autodérision. S’il peut se targuer de n’avoir – quasiment – jamais abandonné et d’être épargné par les blessures, son discours est souvent ponctué par une belle chute. Comme lorsqu’il parle de ses voyages autour du globe. «Les vacances au bord de la mer ne sont pas ma tasse de thé. Sauf après la Diagonale des fous à La Réunion. Ça avait quand même fait du bien de plonger les ampoules dans la mer.» De la même manière, lorsqu’il évoque son voyage en Chine pour la Foulée de la soie. «Courir sous la Grande Muraille est aussi un incroyable souvenir. Ce d’autant plus que c’était mon voyage de noce!» Car sa femme, Sandra, a dû se mettre au pas. «Elle courait déjà un peu, mais à force de venir me voir sur les courses elle s’est aussi prise au jeu.»

Eviter les excès

Si Jean-Claude Pache allie les épreuves cantonales d’une quinzaine de kilomètres aux ultra-trails avec encore autant de facilité à 55 ans, c’est qu’il évite les excès. «Maximum 60 km par semaine et une course toutes les deux semaines, dévoile celui qui compte aussi 20 Sierre-Zinal au compteur. Je privilégie la qualité à la quantité tant à l’entraînement qu’en course. J’aurais dû sacrifier ce principe pour passer sous l’heure à Morat-Fribourg, typiquement.» Mais le Glânois le dit lui-même: «Il faut être un peu maso et se donner à fond. Ne pas mettre de dossard équivaut à rester dans sa zone de confort. J’aime les choses bien faites.» Cette expérience acquise au fil des années et des kilomètres, l’habitant de Lussy en fait aussi profiter les autres. Au sein du club auquel il a toujours été fidèle – le CARC à Romont – il donne des entraînements. «Cela fait longtemps que je le fais. J’essaie de transmettre un peu de ce que je sais, d’aider, dit-il. Ceux qui viennent du football manquent souvent de technique. Le potentiel est là, mais il faut corriger.» Des adversaires, mais néanmoins amis, de ses débuts, il est l’un des derniers à encore tenir le haut du pavé. Cela ne l’empêche pas d’aller encore de l’avant. «Je continuerai jusqu’à ce que je ne puisse plus. Pour le moment tout tient bien», rassure Jean-Claude Pache avec un sourire qui se dessine sous sa moustache. Une chose est sûre, cet amoureux de l’effort a encore de beaux kilomètres devant lui. «J’aime faire du sport pour moi et pour moi seulement. Cela explique aussi peut-être ma longévité», conclut-il.

La Liberté